1971 - 2021 : Les 50 ans du ministère
de l'environnement

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Sauvez les parcs nationaux. Vanoise d’abord !


On vient de le voir, cette prise de conscience des problèmes environnementaux fut un long chemin. Au départ, au lendemain de la fin de la guerre et les années suivantes, elle est le fait d’élites agissant principalement dans les cercles d’influence des institutions présentées ci-dessus. Ensuite, dès les années 1960, elle percola et infusa dans de plus en plus larges pans de la société, notamment au travers de l’action des déjà nombreuses associations de protection de la nature et de l’environnement.

Pour la France, la démonstration de cette prise de conscience peut en être apportée par « l’affaire de la Vanoise » qui verra, à l’instigation des associations de protection de la nature et de nombreuses personnalités, se mobiliser la population pour défendre l’intégrité du parc national de la Vanoise lorsque la station de sports d’hiver de Val Thorens voulut s’étendre sur le glacier de Chavière et le vallon de Polset. De 1969 à 1971, l’indignation, le tollé général et les pétitions pour s’y opposer furent d’une ampleur sans précédent. La Société Nationale de Protection de la Nature (SNPN) [1] diffusa 500 000 exemplaires d’un numéro spécial « Vanoise » du Courrier de la Nature et doubla le nombre de ses membres. La pétition « Sauvez les parcs nationaux. Vanoise d’abord ! », lancée par la jeune Fédération Française des Sociétés de Protection de la Nature (FFSPN) [2] et soutenue par une campagne de presse animée par Jean Carlier (1922-2011) [3], alors directeur de l’information sur la radio RTL recueillit plus de 200 000 signatures.

Après de multiples tergiversations gouvernementales et rebondissements, le président Georges Pompidou donna lui-même l’instruction de stopper le projet au mois de juin 1971. On notera que cette affaire a été aussi, pour Robert Poujade, son baptême du feu, révélant, en la circonstance, sa détermination à assumer ses nouvelles responsabilités de ministre chargé de la Protection de la Nature et de l’Environnement. Jean Carlier qui l’interrogeait sur les promoteurs du projet qui ne voulaient pas lâcher prise, se vit répondre : « S’ils ne comprennent pas, je vais leur rentrer dedans. Qu’est-ce que je risque ? De n’être plus ministre ? Tant pis. Si je dois vivre avec mauvaise conscience, j’aime mieux faire autre chose ».

Pour dire vrai, il n’est pas tout à fait exact de citer « l’affaire de la Vanoise » comme étant la première grande manifestation de l’opinion publique française à faire connaître son opposition à des aménageurs. Entre 1953 et 1963, la création de l’autoroute du Sud, et spécialement son tracé dans la forêt de Fontainebleau déclencha une forte opposition conduite, notamment, par la Société des amis de la forêt, le Muséum avec à sa tête Roger Heim, la SNPN présidée par Roger de Vilmorin, et le journaliste Nicolas Strotsky qui lança une campagne de presse. Ils entraînèrent et coalisèrent derrière eux les cinq académies de l’Institut de France, notamment, et une kyrielle de personnalités pour demander le contournement de la forêt. En vain… ou presque, les ingénieurs des Ponts et Chaussées acceptant, finalement, de passer en lisière de la forêt domaniale mais occasionnant tout de même une coupure avec le massif des Trois Pignons.

Après la catastrophe due à la rupture du barrage de Malpasset en 1959, celle survenue sur le site pétrolier de Feyzin en 1966, le naufrage du pétrolier Torrey Canyon l’année suivante, qui, faisant couler beaucoup de pétrole, a fait couler beaucoup d’encre, et cette « affaire de la Vanoise », la cause de l’environnement et de la protection de la nature acquiert en France une visibilité médiatique dont deux des signes révélateurs sont, la création de l’association française des journalistes et écrivains pour la nature en 1969 [4], à l’instigation, notamment, de Pierre Pellerin (1920-2001) et l’ouverture d’une rubrique « environnement » dans le journal Le Monde, un peu plus tard, en 1972, confiée à Marc Ambroise-Rendu. En témoignent aussi les succès de l’émission de télévision La France défigurée de Louis Bériot (1939-2019) et Michel Péricard (1929-1999) diffusée de 1971 à 1978 sur la seconde puis sur la 1ère chaîne de l’ORTF.