Paul Liégeon est né le 23 avril 1920 à Mulhouse (Haut-Rhin) dans une famille bourgeoise. Son père, Charles, a été directeur des usines Michelin en Égypte, puis courtier en vins à Montpellier. C’est là qu’il effectue ses études primaires et secondaires, avant de s’engager dans des études de médecine. Il entre dans la Résistance en 1943.
En aoà »t 1944, il épouse Odile Emberger, fille du professeur Louis Emberger (1897-1969), auteur de très nombreuses recherches botaniques et phytosociologiques et fondateur du Centre d’Études Phytosociologiques et Écologiques de Montpellier, et petite-fille du professeur Charles Flahaut (1852-1935), pionnier de la phytosociologie et de la phytobotanique, fondateur en 1890 de l’Institut de botanique de Montpellier. Le couple aura quatre filles, Marie-Martine, Marie-Christine, Dominique et Anne.
Paul Liégeon obtient son diplôme de la faculté de médecine de Montpellier le 28 février 1945. Il exerce d’abord sa profession de médecin généraliste à Entrevaux (Alpes de Haute-Provence) de 1945 à 1951. L’année suivante, il s’installe avec sa famille à Cognin (Savoie) o๠il exerce jusqu’en 1985. Il est aussi médecin chef de l’Institut national des jeunes sourds de Cognin (1970-1985). Il est maire de Saint-Sulpice (Savoie) de 1971 à 1977.
Dès son installation en Savoie, le docteur Liégeon s’investit totalement dans des actions en faveur tant de la chasse que de la protection de la nature. Très vite, il acquiert de hautes responsabilités dans ces deux domaines et s’affirme comme un médiateur d’une rare efficacité, cherchant à rapprocher les uns et les autres, jouant de sa prestance et de son autorité pour défendre les intérêts d’une certaine ruralité, sans jamais renier sa volonté de faire progresser la protection de la nature.
Grà¢ce à son ascendant sur le monde de la chasse savoyarde, il obtient en particulier l’accord de ce dernier pour la création du parc national de la Vanoise (1963). Il fait repeupler les massifs montagneux en chamois, cerfs et chevreuils et est l’un des principaux acteurs de la création de la réserve nationale de chasse des Bauges, de la réserve ornithologique des Dombes et du parc cynégétique de Chambord. Président de la région cynégétique Alpes-Jura (1964-1992) et de l’agence régionale de développement cynégétique, en 1988 il reçoit le premier prix et le seul jamais décerné par la Fédération Rhône-Alpes de Protection de la Nature (FRAPNA) à un chasseur.
Grand chasseur, passionné par la recherche et l’approche du gibier, Paul Liégeon a toujours cru en la possibilité d’une entente entre une chasse de plus en plus raisonnable et codifiée et la protection de la nature. Il a été le pionnier de la mise en place des associations communales de chasse agréées, des groupements d’intérêt cynégétique et de la protection des zones humides en Savoie. Il est également à l’origine de l’institution des plans de chasse au grand gibier qui ont permis de mieux prendre en compte la situation des populations d’ongulés sur un territoire donné et, dès lors, de fixer des quotas plus respectueux de la faune. Il s’est employé à réorganiser la chasse sur des bases réglementaires solides : après lui, les choses sont restées durablement établies.
Paul Liégeon a également été un fin pêcheur de truites, trouvant dans l’exercice de cette activité l’occasion de se couper des lourdes responsabilités qui étaient les siennes. Il a toujours regretté la dégradation de la qualité des eaux des torrents de montagne et l’artificialisation des lacs d’altitude.
En tant que membre de l’Association des Amis du parc national de la Vanoise, il a œuvré de toute son énergie pour s’opposer à l’équipement du glacier de Chavière dans l’affaire de la Vanoise (1969-1971) et par la suite, en 1984, contre la création d’un barrage EDF à Sainte-Foy -Tarentaise qui aurait ennoyé le vallon du Clou et une dizaine d’hectares en zone centrale du parc.
Durant son demi-siècle de vie savoyarde, Paul Liégeon a ainsi été un ardent défenseur de la chasse en même temps que le promoteur d’une nature humanisée, riche et vivante de ses diversités. Il s’est éteint à 82 ans, convaincu que l’essentiel avait été sauvegardé et était désormais acquis. Son itinéraire fait de lui un des grands passeurs entre le monde de la chasse et celui de la protection de la nature.